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Entre « Rameaux et Pâques, récit d’une semaine Sainte diabolique » ou « recueil de ce qu’il faudrait absolument éviter de faire en période de COVID ! »

 

Le 10 04 2020, me voici de retour à la maison !  

Je me libère aujourd’hui  d’un lourd fardeau à travers l’écriture. C’est une façon qui m’est propre  de poser les choses afin de m’en affranchir par la suite. Voyez plutôt ça comme une thérapie ou un exorcisme !

J’hésite encore à nommer ce texte entre « Rameaux et Pâques, récit d’une semaine Sainte diabolique » ou « recueil de ce qu’il faudrait absolument éviter de faire en période de COVID ! »

Inquiet, je n’avais de cesse de clamer à qui voulait bien l’entendre  que ce foutu virus était un tueur  et que ce n’était pas le moment de tomber malade. C’eut été plus drôle si j’avais commencé par verrouiller l’info au plus profond de moi-même.

Fin mars, je ne me sentais pas trop bien, cette sensation me gagnait de jour en jour. Les symptômes se traduisaient   par une forte déglutition, un mal de gorge persistant, une gêne dans le haut des poumons comme un début de bronchite et une fièvre qui peinait à gagner un degré par jour.

J’aurais pu suspecter un début de COVID mais j’avais si bien planifié les choses que je n’avais jamais eu à mettre le nez dehors durant les premières semaines de confinement. Habité d’une prudence à toute épreuve et logiquement affranchi de la période d’incubation, je commençais malgré les maux, à me sentir hors de danger...  Le ROI du confinement venait de faire son entrée !

 Dès le début avril, j’ai été réveillé la nuit par des douleurs qui irradiaient le dos du côté gauche. Impossible de dormir donc quelle que fut ma position !  Comme la douleur s’ennuyait, elle y associa une douleur thoracique qui me chatouilla occasionnellement au gré du temps.

Après plusieurs vidéo consultations avec un médecin traitant dubitatif. Sans diagnostique précis et sans autre traitement que le paracétamol, le dimanche 5 avril au soir,  j’ai commencé  à cracher des morceaux rouge vif.  GLOUPS !

Le lendemain, comment dire, j’ai bien entrevu le lundi au soleil  mais sous  la forme d’une chaleur intense que l’on qualifie de  « fièvre » ! Elle n’avait pas renoncé à ses proches amis qui se faisaient un plaisir décomplexé  de l’accompagner… Maux de dos violents, douleur thoracique et autres lambeaux de sang qui gambadaient avec fougue dans  ma bouche !

Vous connaissiez l’expression « cracher ses poumons » !? Et bien moi je vous le dis : OUI, c’est possible ! Dans une panique royale, j’ai appelé la régulation du centre 15  qui, épatée par ma prose  colorée, m’a  envoyé dans le quart d’heure qui suivit,  une belle ambulance flambant neuve pour suspicion de COVID 19 …

En peu de temps, je me suis retrouvé aux abords des urgences de la TIMONE. Peu avant mon  entrée fracassante, j’ai eu le temps d’être impressionné par  la file ininterrompue des personnes qui venaient se faire dépister et que j’apercevais parfois sur les chaines infos.

En franchissant les portes du temple des urgences COVID, j’ai aperçu  de grandes bannières impressionnantes qui semblait destinés à pénétrer votre âme, un peu comme dans un pays totalitaire dans lequel des slogans  vanteraient l’élite et vous susurreraient  à l’oreille : Là mon petit gars, tu y es bien !!!

Quasi immédiatement, une nuée s’est abattue sur moi ! J’étais la fleur en déclin que venait  butiner les abeilles, c’est du moins, la métaphore qui me semble convenir à souhait, mise à part la couleur des tenues du personnel médical...

En quelques secondes, je me suis retrouvé perfusé, branché, piqué de toute part dans mes jolies veines bleues,  truffé d’électrodes sur mon torse viril et herculéen  (ça c’est pour me caresser dans le sens du poil le temps d’une illusion !)

BREF, j’ai bien compris ce qu’est d’être quelqu’un de branché et  j’ai très bien pigé aussi la subtilité des différentes formes que revêt l’expression « être branché » !

Peu de temps après, une jolie interne verte mais paradoxalement plutôt mure d’après ses formes, m’a annoncé qu’il s’agissait  probablement d’une embolie pulmonaire ! (Si vous avez été attentif à mes précédents commentaires, vous avez du relever que je ne me suis jamais plain de mes yeux !)

Il s’agissait de savoir maintenant  si c’était lié au virus ou pas !? Peu avant mon départ vers une chambre dans l’attente du  scanner COVID, on m’ a demandé de ne plus me lever du tout et d’uriner dans un truc qui n’est pas un pistolet classique pour homme mais dans un sac plastique genre primeur  pour y glisser quelques beaux abricots ou quelques vieilles prunes un peu ratatinées. Dans la vie, tout est une histoire de choix … Cet aparté ne représente qu’un pâle intérêt, c’est simplement pour dire qu’uriner totalement allongé dans ce sac en plastique,  c’est un truc de OUF et pourtant, j’ai réalisé cet exploit !

J’ai traversé de nombreux couloirs, toujours tapissés à leur entrée de ces grandes lettres rouges sur fond blanc « SECTEUR COVID ». C’était franchement très angoissant. J’apercevais des personnes recroquevillées sur elle-même, j’apercevais des visages fermés, tristes et j’avançais pendant de longues minutes interminables… Dans le doute, on avait pris soin de me mettre dans un secteur mixte d’attente avant diagnostique définitif. Cette chambre misérable possédait une fenêtre truffée de sparadrap sensé la tenir fermée. Les scotchs délavés volaient au vent puisque la vitre était finalement entrouverte.

J’avais été déplacé du brancard sur un lit. Quand une frêle jeune femme aide soignante est venue me chercher, elle pestait car on lui demandait d’être une  brancardière de substitution. A la TIMONE, tous les brancardiers s’étaient mis en arrêt maladie.  Elle a embarqué le lit avec moi-même dessus, tel une STAR inerte après fermeture du rideau. Notre périple dura facilement un quart d’heure avant de rejoindre le scan ! Nous avons emprunté un dédale de couloir ou les brancards ne pouvaient même pas se croiser. Les marches arrière étaient inévitables. Mon lit à lui seul représentait un brancard et demi en largeur et cognait de toute part. La frêle aide soignante pleurait. Pendant qu’elle me poussait,  son téléphone coincé dans le coup, elle disait à sa responsable que c’était la dernière fois qu’elle faisait cela! J’aurai pu culpabiliser mais au fond, je ne pouvais pas lui en vouloir, elle était à bout …

J’ai attendu avant de passer à mon tour. D’autres personnes à proximité immédiate étaient pour la plupart, probablement infectées. Moi j’étais dans le doute,  très angoissé et tapi derrière un petit masque qui me semblait si ridicule. Pour aller plus vite, l’iode a été littéralement injecté en une seule fois dans le cathéter. J’ai cru qu’on me broyait la main.  Puis ce fut le retour dans une petite salle d’attente dans laquelle on me colla contre un être dans un état plus que critique. J’aurai pu l’appelé Donald au regard de son masque mais je ne le connaissais pas. Nous étions côte à côte.  J’avais peur, pour lui, pour moi et j’avais surtout la crainte de chopper le monstre COVID si je n’étais pas moi-même contaminé…

De retour dans ma chambre, j’ai attendu la cardiologue. Cette femme médecin qui a débarqué dans ma chambre froide à la fenêtre entre-ouverte vers les 20 h 30, était éreintée. Depuis le matin, elle n’avait pas eu le temps de s’assoir pour prendre un repas le midi et n’avait pas encore dîné. Après moi, il lui restait encore deux personnes à visiter. Je l’ai presque rassurée avant qu’elle m’annonce que j’avais fait une embolie pulmonaire et un infarctus du poumon mais que je n’avais pas le COVID ! Ensuite c’est elle qui s’est occupé de moi car paniqué à l’extrême, je revoyais sans cesse les images des personnes atteintes qui m’ont côtoyé de près toute l’après-midi … J’avais la peur au ventre et en même  temps j’avais mal au dos et au thorax.

Peu de temps après,  je suis reparti vers le service CARDIO. (Un des cardiologues que j'ai croisé m'a confié qu'il avait changé de spécialité pour devenir par nécessité et à l'occasion du COVID, un spécialiste urgentiste en médecine générale). On m’a attribué une nouvelle chambre bien plus agréable et l’on m’a rebranché de toute part. J’ai passé une nuit terrible avec une douleur thoracique par pics et à répétition de 22 h à 22 h 30.  C’était l’enfer et si dans mon titre je parle d’une semaine diabolique, c’est justement parce qu’il faut être envouté pour  faire une embolie et un infarctus du poumon en plein COVID ! Et Il faut être aussi un grand malade, ce que j’étais et l’est encore dans tous les sens du terme !

Mais l’histoire diabolique ne s’arrête pas là !!! Les jours se répétèrent ainsi, puis vinrent les urines couleur Guinness, les analyses à répétition et le fameux scanner du jeudi pour trouver une origine associé au facteur V de LEIDEN .Cerise sur le gâteau, la génétique m’a doté de ce maudit facteur V hétérozygote, vous savez le genre de truc malicieux qui amplifie de deux à dix le risque de thrombose !

Jeudi après midi, j’avais les yeux rivés vers la fenêtre, vue imprenable et agréable sur le stade vélodrome, l’hélico du SAMU, les montagnes environnantes, (Mont Marseilleveyre et mont  Béouveyre)  plus loin, la mer et la baie des singes. (Merci de ne pas penser à moi lorsque j’évoque ces primates !)

Deux jeunes soignantes arrivèrent. Elles me mirent dans un fauteuil roulant pour rejoindre cette fois ci un scanner non attribué au COVID. Elles s’arrêtèrent 30 mètres plus loin devant ce que je croyais être le scan. Que la CARDIO puisse pour elle seule détenir un tel appareil me semblait plausible.

J’interrogeais à ce propos une des demoiselles qui me répondit qu’on attendait quelqu’un d’autre. Effectivement ! Il sortit d’une chambre la caricature d’un marseillais authentique, tranquille, désinvolte qui se sentait peu concerné par les règles de distanciation et bien évidemment, sans masque !  Lui, pouvait marcher et l’une des soignantes était là pour l’accompagner. J’étais comme un aimant, il me collait littéralement jusqu’à ce que nous arrivions à l’ascenseur. Il commença à tousser, les mains dans les poches, toujours tranquille…  Les deux accompagnatrices ne dirent mots si ce n’est des banalités  entre elles. J’étais tétanisé.

Arrivés dans le service du scanner heureusement 2 minutes après, on nous parqua dans deux pièces distinctes. Un radiologue solidement équipé vint le chercher. Quand il eut fini le scanner, il le raccompagna. J’en ai profité pour le happer et je lui ai dit ceci. Vous vous rendez compte, ce monsieur, tousse, il est sans masque, il passe devant moi, je ne sais pas s’il est susceptible d’avoir contracté le COVID et il est hors de question pour moi de passer derrière lui. Il m’a répondu :

- Je sais, c’est inadmissible, je l’ai dit à mes collègues mais nous n’avons pas de masques ! Ne vous inquiétez pas, nous allons désinfecter le scanner. Je lui ai fait part de l’épisode dans l’ascenseur. Il m’a répondu que nous aurions du être séparés, la règle étant d’être deux personnes maxi  par voyage en ascenseur. Le personnel est extraordinaire mais parfois, il commet aussi des fautes invraisemblables qui peuvent être lourdes de   conséquence... Je pense que j’ai vécu un des pires moments d’angoisse de ma vie !

Après être passé, j’ai été placé dans un secteur opposé au marseillais décomplexé. Quand les filles sont revenues pour nous récupérer, je les ai interpellées et je leur ai dit que je ne rentrerais pas avec ce monsieur sans masque qui n’arrêtait pas de tousser ! Nous sommes donc repartis séparément…

La nuit de  jeudi à vendredi, pour faire  suite à cette journée scabreuse, j’ai eu la sensation de tomber dans les pommes avec une intensification instantanée du rythme cardiaque .  Cet épisode fut attribué au stress intense que j’avais subi !

Le vendredi après-midi, j’ai à mon sens, libéré  prématurément les lieux  mais il faut bien comprendre que les places à l’hôpital demeurent très chères en période de COVID…

Le taxi s’est pointé, la Timone a disparu de mon horizon, ma rue m’a ouvert les bras et moi j’ai ouvert le store métallique.

CLAP de fin !

 
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